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Revu et corrigé
22 avril 2007

Analyse à chaud

Bon... Vous l'avez peut-être tous déjà vu, les résultats du premier tour des élections présidentielles sont assez éloquents. Un peu plus de 30% des voix pour Nicolas Sarkozy, qui réalise ainsi un des plus gros scores jamais enregistrés sous la cinquième république, et quasiment 26% pour Ségolène Royal, qui lave ainsi l'affront du 22 Avril 2002. Retour donc au clivage traditionnel gauche/droite, mais avec cette fois-ci des candidats jeunes (à peine plus de 50 ans) qui veulent tous deux incarner un profond changement.

François Bayrou, candidat de l'UDF, réalise quant à lui un très bon 18,5%, le triple de son score en 2002. Il apparaît plus que jamais comme le troisième homme, celui dont les reports de voix vont peser très lourd dans la balance. Car avec plus de 6 millions de votants en sa faveur, il va être le personnage politique le plus courtisé de ces deux prochaines semaines. Il faut s'attendre à une lutte sans merci entre le léchage de bottes de la droite envers l'UDF - qui a d'ailleurs déjà commencé - et le faux désintéressement de la gauche, clairement orienté cependant.

Les "petits candidats" sont plus que jamais petits, avec 8 des 12 présidentiables en dessous des 5%, Olivier Besancenot arrivant en tête de ceux là, autour des 4,3%. Important également, l'effondrement du FN n'en est que plus rassurant : les électeurs ont compris la leçon. Le fameux vote utile a ainsi coulé tous les prétendants à une solution alternative, et a nettement dégagé trois tendances, celle du FN ayant été largement écornée.

Alors... Que faut-il retenir de ces résultats ?

1. Un taux de participation dantesque


Avec près de 85% des inscrits ayant voté, le taux de participation est mémorable, et même historique. Pourquoi cette mobilisation sans précédent ? Plusieurs explications sont possibles. La première est évidente : la campagne a été longue, voire très longue, et assez animée. Par conséquent, tout le monde en a forcément entendu parler, et a pu s'y intéresser assez facilement. La deuxième est liée à la première : l'émergence de la puissance d'Internet en tant que média secondaire a fortement contribué à la longueur et à la densité de cette campagne, grâce aux blogs, forums, sites communautaires, etc. La troisième est plus subtile, mais elle est liée à la campagne de Nicolas Sarkozy : il a été très direct dans ses mots lors des deux derniers mois, ce qui a provoqué un double effet amenant les gens à se mobiliser. Premier effet : l'adhésion immédiate à son discours agressif, donc un intérêt renforcé par cette spontanéité. Deuxième effet : le rejet total de cette agressivité, voire la crainte. Donc l'intérêt pour les autres candidats...

2. Un clivage jusque dans les attitudes

Il s'agit maintenant pour les Français de choisir non seulement entre deux personnalités et leurs partis respectifs, mais aussi entre deux conceptions de la société très différentes. On va donc parler ces prochains jours de gauche contre droite, dans le sens "couleur politique". Voyons maintenant les deux arguments principaux de ces tendances, tous partis confondus : à gauche, on appelle à un "Tout sauf Sarkozy" assez radical. A droite, c'est le thème du rassemblement qui est très largement évoqué. Cette différence fondamentale dans les attitudes amène à un constat sans équivoque : la gauche, quelques heures à peine après les résultats, s'est déjà rassemblée. Pour preuve cet appel historique de la candidate FO, Arlette Laguillier, qui a appelé à voter Royal, non pas par pure conviction mais pour faire bloc face à Sarkozy. Tous les candidats de gauche ont appelé au vote Royal : Buffet et Voynet (c'était assez prévisible), mais aussi Besancenot, Laguillier et même Bové. Et à droite ? Hé bien... C'est un peu plus chaotique. Philippe De Villiers a clairement annoncé qu'il ne donnerait aucune consigne de vote, et Marine Le Pen a signifié qu'elle ne soutiendrait pas Nicolas Sarkozy. Jean-Marie Le Pen, lui, a annoncé qu'il donnerait son avis sur la question le 1er Mai. En conséquence, on ne sait pas vraiment ce qui peut se passer à ce sujet...

3. L'énigme du report des voix


Le second tour s'annonce comme des plus indécis, et plusieurs observations sont à soulever. La première, c'est que comme dit plus haut, toute la gauche est déjà rassemblée en bloc, ce qui apporte environ 8 à 10% de voix supplémentaires pour la candidate du PS. La deuxième, c'est l'attitude probable des 11% de votants en faveur du FN : Nicolas Sarkozy ayant largement ratissé sur les terres de Le Pen (et ayant parfaitement réussi son coup...), ceux qui restent sont assez certainement les plus radicaux, les plus "durs", ceux qui voient en Sarkozy un voleur de voix et de programme. Ceux-là ne voteront pas pour lui, et préféreront s'abstenir ou voter blanc, puisqu'il apparaît comme encore plus évident qu'ils ne taperont pas à gauche. La troisième, c'est la grande inconnue du centre. Plus de 18% des Français ont voté Bayrou, on l'a dit, mais ce candidat se voulant au centre, les voix peuvent en théorie se reporter à gauche comme à droite. Il convient d'analyser rapidement l'attitude de l'UDF ces dernières années : après avoir été légèrement à droite, le parti a opéré un revirement radical vers la gauche. Par conséquent, d'un côté comme de l'autre on pourra se prévaloir de l'éventualité d'un appui du candidat béarnais. Cependant, il apparaît que l'électorat de François Bayrou est assez proche de celui de Ségolène Royal : jeune, de classe moyenne. Celui de l'UMP est plus âgé, plus aisé aussi. C'est d'ailleurs un retour aux logiques classiques d'un schéma gauche/droite...

Vous l'aurez compris, tout paraît clair mais en fait rien n'est simple. En tout cas, la bonne nouvelle est le retour de la participation des citoyens, c'est indéniable.

4. Et pour moi...


En ce qui concerne mon avis personnel, j'estime qu'un candidat qui chasse sur les terres frontistes n'a même pas à entrer en ligne de compte dans mon choix. Et d'ailleurs, même la droite ne nie pas cette rafle. Maintenant, le loup va se muer en agneau pour rappeler à l'UDF quels bons amis ils étaient du temps des réformes désastreuses, qu'ils ont signé main dans la main. Effectivement, c'est un rassemblement. Mais un rassemblement d'extrémistes et d'incapables autour d'un candidat certes brillant et fédérateur d'un nouveau souffle pour sa couleur politique mais dangereux de par ses déclarations (eugénisme, "karchérisation des esprits", volonté de créer un ministère de l'immigration, etc) c'est beaucoup trop instable.

Je ne sais pas si Ségolène Royal arrivera à incarner ce changement qu'elle prône, elle aussi. Je ne sais pas si elle sera à la hauteur de son Pacte Présidentiel, qui n'est d'ailleurs pas très étoffé à l'heure actuelle. Mais je sais en tout cas que la droite actuelle est trop dangereuse pour moi, et le pire reste qu'aucun des dirigeants et/ou ministres potentiels de cette droite ultra-libérale n'a jamais répondu aux questions un peu agressives à propos des prises de positions radicales de Sarkozy. Seule Simone Veil a osé dire qu'elle n'était pas d'accord. Le rassemblement, pourquoi pas, mais si il est orchestré en passant sous silence tout le reste et toutes les autres voix...

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